C’est pas tout ça, mais faut bien fêter mes 30 ans d’Education Nationale… Une journaliste me demande quelques précisions… Je fouille dedans ma mémoire..
1980 : J’entre pour 3 ans de formation à l’Ecole Normale d’Arras. Je serai institutrice… comme l’était ma mère… comme le sera surement Marie d’ici quelques années. Il doit y avoir un gène dans la famille, c’est pas possible autrement.…. pour l’anecdote, le sifflet de ma maman est déjà dans les mains de ma puce…
1983 : Premier poste dans le Pas de Calais. Andres, Un petit village très calme et 36 élèves de CE1 ! j’habite dans le logement de fonction , au dessus de l’école. Mes toilettes sont dans la cour… dur dur, l’hiver…Je me souviens d’un petit David, chargé de ramener ses petits frères à 2 km de là ( Il n’y avait pas de bus à cette époque là… Plus d’une fois, j’ai ramené David et sa troupe dans ma voiture). Ces élèves- là ont aujourd’hui 35 ou 36 ans…. C’est difficile à imaginer.
Je travaille aussi avec le CNED : je suis répétitrice auprès d’adultes en difficultés. Ça me plait beaucoup.
1986 : Philippe part pour Tahiti : Je le rejoins. Je suis d’abord nommée dans la petite section d’ école maternelle de Teaopo, au bout de la presqu’île. Mes petits élèves ne parlent pas le français. Et je ne parle pas le tahitien… la bonne blague !
Eux, ont mis des savates et un short pour faire honneur à leur maîtresse, venue de la Métropole. Les savates sont vite rangées, tant ils ont mal aux pieds ! Les jours de tempête, j’ai moitié moins d’élèves, car ceux qui viennent en bateau sont bloqués chez eux !
Une autre fois, envoyée par le ministère de Papeete, je me présente dans une école : panique à bord : la classe n’existait que sur le papier. Il n’y avait ni salle de classe, ni élèves…. Ne t’inquiète pas a dit la directrice, on va arranger ça….. Elle m’a trouvé 6 ou 7 élèves non lecteurs et a installé quelques tables dans un bout de couloir . La récréation se faisait sur la plage : que du bonheur !
1988 : Philippe est nommé sur Trappes, en région parisienne. Adieu les îles. Je me retrouve dans une immense école, au milieu de barres d’immeubles. Dans ma classe, 12 nationalités différentes et 1 seul élève blanc. Les conditions de travail plutôt difficiles, mais des instits très soudés. Belle expérience.
1991 : Philippe débarque en Gironde… Me voilà nommée « Maître E », dans le RASED de Montagne. J’y resterai 7 ans , goûtant au passage à la classe de perfectionnement de Castillon la Bataille. Je travaille avec des petits groupes d’élèves : le pied.
2000 : Me voici à l’école Carré de Libourne, avec les enfants du voyage… là encore des conditions difficiles, mais l’ambiance est très bonne. Ignaccio, primo arrivant, débarque avec une poche de chez Carrefour pour tout sac d’école. Le pensant dans le besoin, je lui propose un ancien cartable des filles.. Il est super content et file le montrer à son père …. qui l’attendait sur le parking de l’école, dans un 4x4, super rutilant, dernier cri…. J’avais tout faux pour le besoin. Mais jamais il ne m’a rendu mon cartable.
2001 : Philippe doit recentrer ses activités sur le Nord Gironde…. On emménage à St Laurent. Une instit me bat aux points et je suis nommée au village d’à côté, où je patiente 4 ans avant de rejoindre, enfin, l’école du village.
J’y suis super bien, jusqu’à la cabale dont je vous ai parlé parfois… Je travaille 3 ans avec Mme Mi –temps… Ca fait partie des plus belles années de ma carrière, car nos caractères et pédagogies se complètent à merveille. A Saint Laurent, je découvre les cycles équitation, le mini bridge, la piscine. La municipalité possède son propre bus, et on peut se balader partout où l’on veut. Les élèves présentent l’intégralité du Petit Prince. On se produit sur une grande scène bordelaise avec Chante Ecole. J’adore.
Dans la classe, un ancien presbytère, en pierres de taille, s’il vous plait, il y a toujours les vieilles tables d’autrefois. Toutes en chêne. Les nouveaux instits trouvent cela has been, peu pratique et réclament des tables modernes. Franchement, je ne vois pas en quoi c’est si important, la forme des tables quand on apprend à lire, compter ou chanter…. Je mettrais volontiers l’argent ailleurs, d’autant que ce sont Mes impôts locaux…. Mais bon….
Aujourd’hui, me voilà à la retraite. Ce n’est donc plus mon problème…. Cette fin d’année m’a permis de retrouver d’anciens élèves… j’étais toute émue. Delphine se souvient du « stylo magique » que je lui avais trouvé et qui lui permettait d’écrire proprement, d’autant qu’elle était gauchère…. Sébastien, lui, se souvient des stylos plumes que j’accrochais sous le tableau et combien il lui avait fallu faire d’efforts pour le mériter…
A croire que j’étais fort attachée à l’écriture et aux cahiers bien tenus…. Je ne le nie pas…lol