Léonard Cohen à l'Olympia
Le coup de foudre…..
les uns en parlent, les autres en rêvent. C’est une sensation si forte, si intense, si belle à vivre qu’on aimerait souvent que ça recommence. Léonard Cohen fait partie de ses coups de foudre, de ses tourbillons qui perdurent tout au long d’une vie.
La première fois que je l’ai croisé, j’avais 15 ans. Je ne savais pas encore que j’allais en prendre pour si longtemps. Il est des partitions qu’on ne saurait gommer…
Mon Grand Copain est donc revenu sur scène. Enfin ! Mon bonheur n’en est que plus grand, moi qui le croyais perdu à tout jamais….. Quelle chance j’ai, ce soir , de vibrer à nouveau au son de sa voix si caverneuse ,si rauque, si douce.
C’est réellement ce que je pense. Oubliés ses 15 ans d’absence, ses 10 ans de bouddhisme. Mais franchement, qu’est ce qui lui a pris ??? Qu’est ce qui l’a fait fuir si loin ?
Ceci dit, 15 ans plus tard, quel calme en lui. Comme il parait serin, tout zen, et franchement heureux de nous retrouver, de retrouver ses musiciens, ses choristes à la voix si pure. Comme il est élégant, tant dans son costume gris, que dans son jeu de scène, ou dans ses propos… Ses yeux brillent de bonheur. Ça se voit, ça se sent. Cohen illumine l’Olympia pour le plus grand plaisir des milliers de « fans » venus le voir et l’écouter.
Il semble souvent ému et étonné de nous voir là, tous réunis autour de lui. Mais comment résister à son appel ? Comment ne pas craquer devant ce poète génial, envoûtant, généreux, et si humble à la fois…
Quand il nous parle, c’est un silence absolu qui s’installe. « La dernière fois que j’étais ici, c’était il y a 15 ans. À l’époque, j’étais juste un gamin animé d’un rêve fou. Depuis, j’ai pris beaucoup de Prozac », ironise t –il , sourire en coin, avant de s’engager dans une liste interminable de calmants qu’il aurait ingurgités à travers les ans pour supporter la vieillesse et les déconvenues de l’existence. Nos applaudissements fusent. « Mais je tire toutefois un enseignement fondamental de tout cela… il n’y a pas de cure à l’amour ». Ain't no cure for love
Quand il chante, les frissons s’invitent. Tout bas, surtout sans faire de bruit, (comme pour ne pas le déranger), on chante avec lui…. On reprend des paroles qui n’auront jamais d’âge et Cohen nous emmène dans son monde de poésie teinté de religion, d’introspection et d’intimité.
Plusieurs fois, au cours du concert, il nous présente ses musiciens. Il retire alors son feutre noir , se tient à l’écart de la scène comme pour ne pas prendre toute la lumière à lui. Il s’agenouille devant son guitariste espagnol, celui là même qui joue de la mandoline à merveille. Tout est délicieux. Faut dire qu’ils sont au top niveau, et qu’ils permettent à Cohen d’être porté par sa musique.
Les titres s’enchaînent et on ne se lasse pas des les entendre. Qu’ils viennent des années 60, Hey, That’s No Way To Say Goodbye ou des années 90 , Anthem, qu’ il présente ainsi : « Nous avons tellement de chance de pouvoir nous retrouver ici, ensemble, et profiter ensemble de cette soirée, alors que tant d’endroits à travers le monde sont plongés dans le chaos… Il n’a pas tort Tant de titres devenus des classiques : Everybody Knows, In My Secret Life, ou Who by Fire que que Javier Mas embellit encore avec un air de flamenco.
On se régale.
On s’amuse autant que lui alors que ses choristes font leur ba di dam ba di dam dam dam et qu’il leur chuchote : « Don’t stop… »
Et les filles de continuer inlassablement. et Cohen de rajouter : « J’ai enfin compris cette nuit ce que je cherche depuis longtemps. Il a fallu que je vienne ici pour enfin comprendre cette recherche. »
Les filles poursuivent sans se démonter… ba di dam…
«Oh please don’t ever stop » dit …Il.
Et il sourit, et nous aussi….On accroche à son humour discret.
Et cela dure, et il conclut avec quelque chose comme ça. « Ce que j’ai toujours cherché se trouve dans ce ba di dam di dam… dam. »
Tonnerre d’applaudissements.
On aime Cohen et ses pirouettes.
Après un entracte de quelques minutes, Cohen revient sous nos applaudissements pour rebondir sur l’un de ses thèmes favoris : la vieillesse, le temps qui passe et sa relation compliquée avec la musique. « Mes amis sont tous partis et mes cheveux sont gris, j’ai mal aux endroits grâce auxquels je ‘‘jouais’’ autrefois (…), je ne fais que payer ma rente dans la tour des chansons », dit-il avec légèreté, s’accompagnant d’un petit synthétiseur .
Et les chansons défilent encore, chargées de souvenirs. C’est toute une intimité revient à nous. Que d’émotions…
On fredonne Suzanne. On se délecte, quand transi il se lance dans ce tube, aujourd’hui repris par tant de chanteurs : Hallelujah, cet Hallelujah qu’il a mis plus de 10 ans à écrire. Ses mots sont de passion, se désespoir, d’espoir encore : « J’ai fait de mon mieux, ce n’était pas grand-chose ; je ne pouvais pas sentir, j’ai dû apprendre à toucher, j’ai dit la vérité, je ne suis pas venu jusqu’ici ce soir pour vous tromper ; et même si tout a été de travers, je me tiendrais devant le dieu de la chanson avec nul autre mot que Hallelujah au bout de la langue. »
Il poursuit, nous séduisant avec I’m Your Man, une autre de mes chansons cultes. Puis, dans un silence quasi religieux il récite A Thousands Kisses Deep, l’un des poèmes de son dernier recueil. Un grand moment de générosité où le poète s’abandonne totalement devant nous.
La suite est tout aussi magnifique . Cohen interprète un hommage à Garcia Lorca, Take This Waltz, puis revient sous une tonne d’applaudissements, en bondissant presque sur scène, pour chanter quelques-unes de ses premières chansons, comme So Long, Marianne, et certaines un peu plus récentes, telle l’époustouflante et très difficile Closing Time.
On est enchanté par autant de générosité et par la joie de d'entendre sa voix toujours aussi profonde, rauque et chaude. Avec First We Take Manhattan, il se lance dans une interprétation endiablée d’une chanson devenue politique au fil des ans, un hymne contre le fascisme. Sans parler des 2000 spectateurs qui se sont levés quand il a entamné le Partisan..... Que de frissons à ce moment là....
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Après trois heures de concert, trois rappels et une dizaine de standing ovations, il nous a offert une longue interprétation de I Tried To Leave You, qui lui a permis de présenter une dernière fois ses musiciens, . Puis, il a clos la soirée , par un negro spiritual « Whither Thou Goest » ; a cappella, avec tous ses musiciens et ses trois talentueuses choristes : sa fidèle collaboratrice Sharon Robinson et les deux sœurs Webb.
Toutes trois ont une voix parfaite, tant elles soutiennent, rehaussent et magnifient la voix de Cohen.
Quel concert ! Sans mentir, Cohen nous a offert un tit moment inoubliable. Le monde et ses bétises se sont arrêtés un instant pour pour des retrouvailles bouleversantes de simplicité.
Bien sur, tout à l’heure, il me faudra redescendre et retrouver la terre ferme. Mais bon, je ne suis pas pressée…
Son programme :
Dance me to the end of love - The Future- Ain't no cure for love- Bird on the wire -Everybody knows -In my secret life- Who by fire- Chelsea Hotel -Anthem -Tower of song - Suzanne -Gypsy wife -The Partisan -Boogie Street -Hallelujah -I'm your man -1000 kisses deep (recital) -Take this waltz -So long, Marianne -First we take Manhattan -Famous Blue Raincoat- If it be your will -Democracy- I tried to leave you- Closing Time -Whither Thou Goest
http://tf1.lci.fr/infos/jt/0,,4171367,00-le-grand-retour-de-leonard-cohen-a-paris-.html